lundi 20 avril 2015

Didactique !

Dans ces pages, nous avons déjà  considéré la question des bons étudiants, souvent pénalisés par les moins bons (on voit que je vieillis : je deviens politiquement correct). Voir par exemple http://hervethis.blogspot.fr/2014/10/promouvoir-les-meilleurs-etudiants-nest.html. Aujourd'hui, j'ai le plaisir de faire état d'un article remarquable de mon ami Philippe Boulanger dans la revue Science & Pseudo-sciences.  Cet article s'intitule "Didactique ?".

Didactique ? Selon le Trésor de la langue française informatisé, le mot signifie "qui vise à instruire", mais il y a un substantif qui signifie "art d'enseigner, d'exposer méthodiquement et systématiquement les principes et les lois d'une science, ou les règles et préceptes d'un art". 

Muni de ce viatique, lisons Philippe Boulanger : 

" J’ai participé à une des ces commissions paragouvernementales où les participants, politiques ou fonctionnaires pour la plupart (« ou » non exclusif) argumentent pour délivrer un rapport sur un sujet de société. [...] J’ai osé prôner un enseignement de certaines disciplines scientifiques plus riche et plus exigeant afin de solliciter et aiguillonner les meilleurs. J’ai été aussitôt un objet d’opprobre de la part de petits marquis, dont on ne sait quelles circonstances improbables les ont propulsé au statut de penseurs, et je fus accusé de vouloir « faire du didactique ».  Le terme est aujourd’hui, une insulte."

Oui, une certaine pensée pour laquelle tout se vaut ne supporte pas qu'il y ait un "maître", et des "élèves". Certes, je suis de ceux qui veulent apprendre sans maître, mais on se souvient d'un billet précédent où je faisais l'éloge du livre de Nicolas  Piskounov (http://hervethis.blogspot.fr/2015/04/un-livre-remarquable.html), et c'est un fait que certains manuels de science sont meilleurs que d'autres. C'est un fait que certaines expositions des théories sont plus simples que d'autres. C'est un fait que certains professeurs sont plus captivants.

On n'oubliera pas, à ce sujet, de rappeler que Michael Faraday remplissait l'amphithéâtre de la Royal Institution pendant une semaine, avant Noël, en se concentrant sur les phénomènes qui ont lieu lors de la combustion d'une bougie : il savait, très élégamment, partir d'observations simples, anodines, pour conduire ses auditeurs à la pointe du savoir de l'époque, au point qu'il en fit une Histoire d'une chandelle, un livre qui enchanta quelques générations d'enfants. Vers la même époque, François Arago faisait courir tout Paris à ses conférences expérimentales. Et, en France encore, on sait que le Palais de la Découverte a suscité de nombreuses vocations scientifiques (et continue de le faire, raison pour laquelle il faut soutenir son action de muséologie expérimentale !). 

Bref, c'est un fait qu'il existe des manières d'enseigner meilleures que  d'autres, fussent-elles de laisser l'élève se faire son savoir, sans maître de chair et d'os, mais en lui donnant de bons livres... qui auront été faits par de bons... professeurs.  Revenons à Philippe Boulanger : 

"« On » m’a expliqué, avec un petit sourire sans indulgence, qu’il ne s’agissait pas de « se gaver de connaissances », mais de se les approprier par une démarche personnelle et innovante, garantie, je crois comprendre, par l’ignorance.L’innovation actuelle, du moins en mathématiques, a été de vider progressivement les programmes. J’ai dernièrement comparé les livres de mathématiques de la classe de troisième (Lebossé et Hémery) aux livres actuels. Si la qualité de la présentation des nouveaux livres est notable,  la diminution du contenu est flagrante."

Ici, il y a plusieurs choses. La question du "gavage de connaissances" doit être discutée, tout d'abord, à la lumière de mon expérience personnelle, de maître de stage d'étudiants.
Ainsi, je ne cesse de m'étonner, quand je discute avec nos jeunes amis, que nombre de ceux qui suivent des études universitaires de chimie ou de biochimie ne sachent pas de la physique élémentaire, telle l'expression de la poussée d'Archimède ou l'expression du potentiel chimique.  Interrogés sur leurs lacunes, ils me répondent qu'ils ont appris ces notions, mais qu'ils les ont oubliées. Et il y a cette idée selon laquelle il n'est pas nécessaire de s'encombrer l'esprit avec ce que l'on peut retrouver en un clic sur Internet. 

Je suis de ceux qui, dans leur enseignement, font bien la différence entre   :
(1) les informations  (que l'on trouve effectivement sur Internet, et qu'il n'est donc pas nécessaire de retenir) ;
(2) les notions et concepts, qu'il faut connaître, comprendre et retenir, mais, surtout, savoir mettre en oeuvre ;
(3) les méthodes, qui sont essentielles, centrales, des trésors que nous  devons collectionner, parce que, plus encore que les notions et concepts, elles nous portent, nous donnent l' "intelligence" (mot employé à dessein) du monde ;
(4) les anecdotes, qui sont de la chair autour de l'os, qui donnent aux matières intellectuelles ce "moelleux" qui leur manque souvent ; les anecdotes sont aussi ces sourires de la pensée qui font la vie encore plus  belle, ces respirations qui nous permettent d'avancer confortablement ;
(5) les valeurs, sur  lesquelles tout le reste s'édifie, et qui, je crois, méritent  d'être explicitées et discutées. 

Tout cela étant dit, il faut aussi considérer qu'il existe une différence entre des "connaissances" et des "compétences".  Dans la "vraie vie", la vie du laboratoire, par exemple, il FAUT être capable de faire une règle de trois sans se tromper, il FAUT savoir que la poussée d'Archimède existe (on voit que je prends un exemple simplissime, et que, en conséquence, je ne peux pas être considéré comme très élitiste), il FAUT savoir calculer le pH d'une solution d'un acide faible dans de l'eau, il FAUT... Il faut savoir mettre en oeuvre des connaissances que l'on a apprises... sans les avoir oubliées.
Tout cela ne s'obtient pas en claquant des doigts, mais à force d'entraînement. Certains diront que comparaison n'est pas raison, que l'esprit et le physique ne sont pas comparables, mais je maintiens que celui qui se lance dans une longue course à pied sans entraînement ne vas pas au bout. Celui qui ne s'est pas entraîné à soulever des poids ne les soulève pas. Celui qui n'a pas répété jusqu'à le savoir intimement que S = ln Ω ne sait pas le mettre en oeuvre le moment venu.
Bref, le mot "gavage" est compliqué, et je le déteste, parce qu'il jette un voile péjoratif sur la belle idée d'apprendre. D'ailleurs, on retrouve ici ma distinction entre "enseigner" et "apprendre". En réalité, je me moque de l'enseignement, et seul compte, pour l'étudiant, le fait d'apprendre ! Comme dit ailleurs, je propose que les diplômes soient toujours  attribués à ceux qui ont fait l'effort d'avoir les compétences bien décrites dans une sorte de contrat explicite.  Peu importe la manière dont l'étudiant obtient ces compétences ; seul compte le fait qu'il les ait. 

Reste la question de la différence (réelle) entre le contenu de l'enseignement d'avant et l'enseignement d'aujourd'hui. J'aurais tendance à être d'accord avec Philippe Boulanger, mais avec un peu d'hésitation : dans la mesure où le contenu des matières a changé, où de la technologie s'est introduite, par exemple, on pourrait imaginer que les élèves de Troisième sachent autre chose que ce qui était enseigné naguère. Par exemple,  les élèves qui ont connu la "réforme des mathématiques modernes", avec la théorie des ensembles, ont appris moins de géométrie, certes, mais ils ont finalement su autre chose : de la théorie des ensembles. Bref, il faut y voir de plus près. 

Le dernier paragraphe de Philippe Boulanger mérite également notre plus grande attention : 

"Je me demande, attitude peu à la mode, si la volonté de ne pas faire de sélection ou de supprimer les notes dans l’enseignement pour ne pas disqualifier les moins favorisés, aboutit au but visé. Si l’enseignement public est bon et riche en contenu, les statuts individuels ont moins d’effets sur l’avenir des enfants. En revanche, si l’enseignement général est insuffisant ou ne sollicite pas assez les élèves, les attitudes individuelles ont plus de poids. Au contraire des enfants défavorisés par l’environnement et la fortune, les enfants qui vivent dans des familles aisés, ou celles où la culture à de l’importance, seront aiguillonnés et réussiront à acquérir dans l’ambiance familiale les connaissances nécessaires à leur épanouissement."

Là, on retrouve cette idée que j'évoquais en tout début de texte, à propos de sélection dans l'université. Je vais essayer, comme souvent, de ne pas être politiquement incorrect, en collant à idées consensuelles. On sait que : 

- il est louable de souhaiter que le plus grand nombre de citoyens aient une qualification aussi avancée que possible, car  le secteur tertiaire s'est considérablement développé,

- il est louable de souhaiter que le plus grand nombre de citoyens aient une qualification avancée, car cela leur évite d'être de la "chair à canon"

- le citoyen a un droit à l'éducation, puisqu'il le paye par ses impôts ; de sorte que l'université doit être ouverte à tous. On voit que je vais ici encore plus loin que nombre de mes amis que je dirais "progressistes", et je renvoie à un billet précédent que j'avais consacré à Pierre Duhem, homme remarquable bien que très raide, dont les leçons universitaires s'apparentaient à celles d'un François Arago ou d'un Michael Faraday, en cela qu'elles faisaient accourir les citoyens à l'université... pour de la vulgarisation. 

Mais après des décennies de mauvaise foi, où j'ai voulu ne pas voir de  différence entre la vulgarisation et l'enseignement scientifique, je m'aperçois que le maniement des outils formels fait la différence. Dans un cas, il y a de la connaissance, et, dans l'autre, de la compétence. La compétence, elle, est "sanctionnée" (comme on dit) par un diplôme, lequel -et c'est là une idée à laquelle je tiens- ne doit pas être vidé de son sens, quand il est international, sans quoi nous vivons dans le rêve, la lubie. Je propose que nos universités comparent leurs diplômes à ceux des autres pays : d'Europe, mais aussi de Russie, des Etats-Unis, de Chine... 

La sélection, donc ? La sanction des diplômes s'impose, et l'on doit tout faire pour que seuls les étudiants capables les obtiennent. Changer les méthodes d'enseignement, par exemple : j'ai déjà largement discuté la possibilité d'éviter le gavage, par l'emploi de méthodes pédagogiques modernes, et, dans quelques enseignements que je fais, je multiplie les tests (projets, forum, travaux de groupe à responsabilité individuelle, projet pratique, lecture d'article scientifique...) afin de voir quelles méthodes sont plus efficaces que d'autres. 

Toutefois, c'est un fait que certains étudiants sont plus que d'autres, sur l'échelle finale des compétences données par les enseignements. Les notes ? J'hésite : soit on a une compétence demandée par le "référentiel" du diplôme, soit on ne l'a pas.  Et je vois très bien que chaque étudiant n'ait pas de notes, mais seulement des attestations de validation des compétences. A cela près que, quand, pour nos masters, nous évaluons les candidats (nous en retenons une vingtaine parmi des centaines), nous ne prenons que les "meilleurs", ce qui signifie ceux qui ont eu les meilleures notes dans leurs universités. C'est un fait, et j'attends des conseils pour faire différemment, si quelqu'un a une idée. 

Mais je me suis éloigné du paragraphe cité, du texte de Philippe Boulanger. On comprend que ce paragraphe m'intéresse beaucoup, et son "Je me demande" très rhétorique mérite que nous nous arrêtions. Cette fois, je ne vais pas commenter la phrase, mais inviter tous mes amis à y réfléchir. La chose est importante : il en va de la qualité de l'enseignement ! 







Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)   

samedi 4 avril 2015

Combattons les mauvais manuels... pour aider les apprenants !


Oui, je déteste les mauvais manuels, car je considère que  l'enseignant a une responsabilité vis-à-vis des apprenants. 

Mieux, c'est la nature même de sa compétence que d'éviter de fourvoyer les élèves. Bien sûr, les savoirs scientifique étant révisables, il peut s'écouler un certain temps avant qu'une notions nouvelles aille dans l'enseignement, mais 15 ans, c'est vraiment trop !
Or l'on vient de me signaler un manuel de diététique et de nutrition qui propage encore ces idées fausses de la cuisson par concentration et de la cuisson par expansion.
Ces notions, fausses, ont été éradiquées  des référentiels du CAP hôtellerie restauration lors de la 17e Commission paritaire, et les auteurs des manuels que je vise n'ont donc pris aucun soin à supprimer ces idées fausses, de sorte qu'ils sont responsables de l'apprentissage erroné des élèves. C'est intolérable !

Expliquons la chose. Pendant quelques décennies, on a enseigné qu'il existait deux types de cuisson : les cuisson qui étaient dites « par expansion » et les cuisson qui étaient dites « par concentration ». Il était dit que le rôtissage du rôti était une cuisson par concentration,  et il était écrit et enseigné que les jus, les sucs, se réfugiaient à l'intérieur des viande, lors de la cuisson.

Cela n'est pas possible, car les viandes sont faites de solide et d'eau, lesquels sont incompressibles, et c'est la raison pour laquelle, quand la viande se contracte à la chaleur, les jus sont exclus, tombent dans le plat à rôtir, sont évaporés, et laissent ce résidu brun qui a  beaucoup de goût. Il n'y a pas de concentration du jus ;  il n'y a pas dans de concentration des goûts dans la viande, mais seulement une croûte brune qui a beaucoup de goût, en périphérie. 

Dans le temps, les livres d'enseignement (fautifs, donc) montraient des schémas (fautifs, j'insiste), avec des flèches vers l'intérieur de la viande. Ces flèches ne peuvent en réalité désigner que la propagation de la chaleur. Il est exact que la température augmente d'abord à l'extérieur de la viande. Toutefois le mot « concentration » reste alors fautif, car il n'y a concentration de rien ! Mieux, on devrait dessiner des flèches  vers l'extérieur !

Pour la cuisson fautivement nommée « par expansion », les manuels périmés montraient des flèches vers l'extérieur. Pour ces cuissons, de type pot-au-feu, les flèches pouvaient alors désigner des matières cédées par la viande au bouillon, mais « expansion » ?
La viande ne se dilate pas : elle se contracte, tout comme dans le rôtissage !  Ce dont on s'aperçoit facilement en pesant ou en mesurant un volume. Un morceau d'un kilogramme avant la cuisson finit à environ 750 grammes après cuisson. La viande s'est contractée, et son volume a diminué.
Pour mesurer la diminution de volume, c'est tout simple : il suffit de mettre du riz ou de la farine dans un récipient, de plonger de la viande, on marque un trait au  niveau atteint par le riz. Puis on cuit et on mesure à nouveau : on voit alors que le nouveau niveau est plus bas que le premier, ce qui prouve que la viande a perdu du volume. Rien de difficile dans tout cela, et l'expérience nous montre que la viande n'a pas gonflé, qu'il n'y a pas eu d'expansion. Ce qu'il y a eu, c'est une perte.

Mais  il y avait également eu une perte lors du rôtissage ! Autrement dit, dans un rôtissage comme dans un pot-au-feu, la viande s'est contracté et a perdu dans les deux cas.
La même chose dans les deux cas !  Il y aurait donc lieu de dessiner les mêmes flèches dans les deux cas. La différence entre les deux cas, c'est le goût, bien sûr ! Une viande cuite au four à 180 degrés brunit, s'entoure d'une croûte, tandis qu'une viande bouillie n'a pas de croûte, ne brunit pas.

 Il y a donc lieu de changer l'enseignement, mais, surtout, de réviser très rapidement ces manuels minables qui continuent de propager des erreurs dénoncées il y a quelques décennies.
J'invite mes collègues à militer pour que, très rapidement, soient bannis de l'enseignement les théories périmées, fausses,  dont on peut se demander pourquoi elles sont encore propagées.
De la paresse de la part des auteurs de manuels ? De la négligence ? De l'ignorance ? Du manque de travail ?









Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)    

Des flans sans oeufs : comment les faire ?

Des flans sans oeuf ? Cela semble bien impossible, mais http://www.agroparistech.fr/Comment-faire-un-flan-sans-oeuf.html




















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Des protéines dans la purée

Comment introduire des protéines dans une purée ? La réponse est sur http://www.agroparistech.fr/Comment-introduire-des-proteines.html






















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A propos de sauce mayonnaise

La sauce mayonnaise ? Facile : http://www.agroparistech.fr/La-sauce-mayonnaise.html















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Pâtes brisées ou sablées ?

Pour les faire bien, il est bon de comprendre comment elles se font, et cela est expliqué sur http://www.agroparistech.fr/Comment-faire-une-bonne-tarte.html 













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Des sciences qui seraient exactes ?

Dans un débat avec des amis des sciences de l'humain et de la société, j'ai été confronté à l'expression "sciences exactes" : la terminologie est de mes amis, et pas de moi, qui ait décidé de ne parler que de sciences de la nature, dont j'exclus les mathématiques, puisqu'elles sont d'une autre nature, même si demeure ce grand débat entre mathématiques découvertes et mathématiques inventées.


Sciences exactes ? Je propose de ne pas confondre le savoir (ou prétendu tel, surtout en matière de sciences) et la recherche du savoir, à laquelle je propose de réserve le nom de science. La science, dans cette définition, est donc la recherche de savoir.

Sciences exactes ? Il me semble qu'il y a là une difficulté de même nature que dans "sciences humaines", à savoir un emploi ambigu de l'adjectif.
Commençons par  "sciences humaines"  : c'est un pléonasme, car la science est une activité de l'être humain, et de nul autre espèce. Généralement, ce pléonasme est une périssologie. Sciences de l'homme ? C'est mieux, mais la femme ?
Sciences exactes ? Cela voudrait indiquer que certaines activités de recherche du savoir sont "exactes" ? Que serait donc une activité exacte ? Selon le TLF (le seul qui vaille), le terme "exact" signifie "Conforme aux règles prescrites, aux normes, à la convenance, aux usages, qui s'y conforme".

Nos amis des SHS qui parlent de sciences exactes pour les sciences de la nature voudraient-ils alors dire que leur propre activité n'est pas conforme à leurs propres règles ? Qu'elles ne suivent aucune norme ?
Je croyais pourtant -on me l'a assez répété- que les historiens avaient leur méthode, tout comme les sociologues, ou les géographes ? Les philosophes ?

Laissons-les de côté, afin de ne pas compliquer un débat qui n'est déjà pas parfaitement clair (quelle méthode commune entre Héraclite, Platon, Nietzsche ou Meyerson ?).
Pour les sciences de la nature, oui, il y a des canons, lentement élaborés, et qui se retrouvent aujourd'hui dans la structure des publications scientifiques, qui collent à la description que je propose (et qui n'a toujours pas été réfutée ou critiquée), à savoir :
- observation d'un phénomène
- caractérisation quantitative du phénomène
- réunion des données quantitatives en lois synthétiques
- recherche de mécanismes quantitativement compatibles avec ces lois
- recherche de prévisions expérimentales testables
- test expérimental en vue d'une réfutation de la théorie proposée
- et ainsi de suite.

Toutefois, cette conformité des sciences de nature ne peut conduire les scientifiques de la nature (on voit que je distingue la science et ceux qui la font, sans quoi on tombe souvent dans des erreurs terribles) à prétendre à l'exactitude de leurs descriptions du monde, pas plus que les sciences de la nature ne prétendent à la description exacte du monde, et encore moins à la "Vérité" !
Il faut user d'une rhétorique vraiment nauséeuse, détestable -celle de l'homme de paille- pour le faire penser.



Bref, je propose que nous abandonnions tous l'expression "sciences exactes".
Pour les sciences de la nature, je propose que nous utilisions l'expression "sciences de la nature" ou "sciences quantitatives", à moins qu'une nouvelle expression reste à inventer ? 


















Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)